LE CHEMIN QUI CONDUIT AU NIBBANA

Le chemin qui conduit au nibbana est la voie Moyenne majjhima patipada, ainsi appelé parce qu'elle évite deux extrêmes: l'un, l'abandon aux plaisirs sensuels, qui est "bas, grossier, vulgaire, impur et sans profit"; l'autre, l'abandon aux mortifications, qui est "douloureux, impur et sans profit".
"Rejetant ces deux extrêmes, le tathagata (celui qui est venu ainsi) a découvert la voie Moyenne qui donne la perception claire et la Connaissance, qui conduit à la paix, à la sagesse, à l'Eveil, au nibbana". C'est le Noble Octuple Chemin qui est composé de huit facteurs :

1 - La Compréhension Juste-samma ditthi
2 - La Pensée Juste- samma sanghakappa
3 - La Parole Juste- samma vaca
4 - L'Action Juste- samma kammanta
5 - Les Moyens d'Existence Juste- samma ajiva
6 - L'Effort Juste- samma vayama
7 - L'Attention Juste- samma sati
8 - La Concentration Juste- samma samadhi

La voie Moyenne, constituée par la Moralité sila, la concentration samadhi et la sagesse pañña, est résumée dans ces beaux vers :"Sabba pâpassa akaranam Kusalassa upasampadâ Sacitta pariyodapanam Etam Buddhâna sâsanam" "S'abstenir de faire le mal, Cultiver le bien, Purifier son esprit, Tel est l'enseignement des Bouddhas".
Le Noble Octuple Chemin qui constitue l'essence de l'enseignement du Bouddha, est aussi un chemin de culture et de progrès intérieur.
La Moralité est la première étape sur le Chemin qui mène au nibbana.
Un bouddhiste ne tue pas et ne nuit à la vie d'aucun être vivant; il est bon et compatissant envers tous, y compris la plus petite des créatures qui rampe à ses pieds.Il ne prend pas le bien d'autrui et pratique l'honnêteté et la droiture en toutes circonstances.
Il ne cède pas aux convoitises de la chair, pour ne pas avilir la noble nature de l'homme.
Il se garde du mensonge, car il doit être toujours sincère et digne de confiance.
Il s'abstient de l'usage des boissons enivrantes et des stupéfiants qui l'empêchent d'être sobre et diligent.
Un vrai bouddhiste est tenu d'observer ces principes éthiques fondamentaux dans sa vie quotidienne. Pour celui qui est déterminé à suivre l'Octuple Chemin de la paix, la non-observrance de ces principes crée des obstacles qui retarderaient sa marche vers la Délivrance.
Si les circonstances le permettent, le pèlerin spirituel peut progresser en observant trois ou cinq préceptes de plus.

Ainsi, aspirant vigilant, avance-t-il lentement et régulièrement, maître de ses paroles, de ses actes et de ses sens. Il se peut que sa force Kammique le pousse à renoncer aux plaisirs terrestre et à adopter la vie de l'ascète. Il pense alors que :
"Source de conflits est la vie de famille, Pleine de labeur et de soucis. Mais libre et haute comme le ciel, Est la vie que les sans-foyer mène".
Cependant, il n'est pas nécessaire d'être un Bhikkhu pour pouvoir atteindre son but. Un Bhikkhu fait des progrès spirituels plus rapides, mais un disciple laïque a aussi toute possibilité de devenir un Saint.
Prenant fermement appui sur la Moralité, le pèlerin poursuit son chemin en abordant une pratique plus élevée, le samadhi, la discipline mentale, qui constitue la deuxième étape sur le Chemin de la Pureté.

Le samadhi consiste à concentrer son esprit et à le garder fixé sur un seul point, à l'exclusion à tout autre. Parmi les différents sujets de méditation qui varient selon le tempérament de chaque individu, il y a la concentration sur la respiration, la plus facile, qui permet de discipliner l'esprit; la méditation sur les Quatre Etat Sublimes brahmavihara: l'amour universel metta, la compassion karuna, la joie sympathique mudita et l'équanimité upekkha, qui apportent la paix de l'esprit et le bonheur. Ces Quatre Etats sont aussi appelés les Quatre Etats Illimitables, parce qu'ils sont des pensées nobles et pures adressées à tous les êtres vivants, sans limitation.

Après avoir soigneusement choisi le sujet de méditation qui lui convient le mieux, il s'efforce de fixer son attention sur ce sujet, jusqu'à s'y absorber si complètement que toutes les autres pensées s'effacent de son esprit.

Les cinq obstacles qui gênent sa progression, c'est-à-dire, les désirs sensuels, la haine, la paresse et l'indolence, l'agitation et les pensées harcelantes, le doute, sont temporairement écartés. Finalement, il atteint à la concentration extatique, et à sa grande joie, il s'absorbe dans le jhana. Il peut alors jouir du calme et de la sérénité que donne une parfaite absorption méditative de l'esprit.

Arrivé à ce stade, il est capable de développer les Cinq Pouvoirs Supranormaux qui sont l'Oeil Divin, l'Oreille Divine, le Souvenir des Existences Passées, la Lecture des Pensées, et divers Pouvoirs Psychiques. Toutefois, il n'est pas indispensable de posséder ces pouvoirs supranormaux pour parvenir à la Sainteté.

Il reste au Pèlerin à repousser définitivement les obstacles qui pourraient resurgir sur son Chemin, à détruire complètement les passions momentanément domptées par la Discipline et la Concentration; à parvenir à la troisième et dernière étape, la Vision Pénétrante vipassana pañña, qui seule lui permet d'acquérir la parfaite connaissance de toutes choses, et atteindre le But Ultime.

Avec son esprit bien discipliné et semblable maintenant à un miroir poli, il regarde le monde pour avoir une vue juste de la vie. Dans quelque direction qu'il se tourne, il ne distingue nettement que les trois Caractéristiques : l'Impermanence anicca, la souffrance dukkha et le Non-soi anatta. Il comprend Qu'il n'y a rien qui ne soit conditionné par une cause; que tout ce qui est conditionné est impermanent et que la vie est un perpétuel changement. Ni aux cieux ni sur la terre il n'existe de vrai bonheur, car tout plaisir dans son essence est source de souffrance, et est le prélude à la douleur. La souffrance provient de l'impermanence, et là où il y a changement et souffrance, il ne peut exister d'âme immortelle.

Il choisit alors une des Trois Caractéristiques et continue inlassablement à développer la Vision Pénétrante dans cette direction, jusqu'au glorieux où il entrevoit le nibbana, après s'être débarrassé des trois premières Entraves qui sont: l'Illusion du Soi, le Doute, la Croyance en l'efficacité des rites et cérémonies.

Il a ainsi atteint la première Etape de l'Emancipation conduisant à la Sainteté. Il est appelé un sotapanna - Celui qui est entré dans le courant menant au nibbana. Comme il n'a pas brisé toutes les Entraves, il renaîtra encore sept fois tout au plus.

Cultivant encore plus profondément la Vision Pénétrante de la Sagesse, le Noble Pèlerin avance rapidement et atteint la deuxième Etape de l'Emancipation conduisant à la Sainteté. Il devient un sakadagami - Celui qui reviendra une fois en rejetant progressivement deux Entraves de plus, c'est-à-dire, les désirs sensuels et la Répulsion. Il ne renaîtra plus qu'une seule fois, au cas où il ne deviendra pas un arahat.

C'est à la troisième Etape de l'Emancipation conduisant à la Sainteté qu'il devient un anagami - Celui qui ne reviendra plus - et qu'il détruit complètement les deux Entraves susmentionnées. Par la suite, il ne reviendra plus sur cette terre et ne cherchera pas à renaître dans les royaumes célestes, car il n'a plus de désirs sensuels. Après sa mort, il renaîtra dans les Pures Demeures suddhavasa, jusqu'à ce qu'il devienne un arahat.

Maintenant, encouragé par le succès de ses efforts, le Saint Pèlerin fait le reste du chemin, en détruisant les cinq dernières Entraves qui sont : le désir de vivre dans les Royaumes des Formes, le désir de vivre dans les Royaumes sans Formes, l'Orgueil, l'Agitation et l'Ignorance. Ayant atteint la quatrième et dernière Etape de l'Emancipation conduisant à la Sainteté, il devient un Saint, un Parfait, un arahat.

Il sait alors que ce qui devait être accompli a été accompli, qu'il a détruit toutes les impuretés, qu'il s'est libéré d'un lourd fardeau de souffrance, qu'il a totalement anéanti toutes les formes d'attachement et d'ignorance, et qu'il a atteint le nibbana. Le parfait se tient à présent au-dessus des sommets célestes, bien loin des passions tumultueuses et des souillures du monde. Il jouit de la béatitude indicible du nibbana, et comme les arahat d'autrefois, il fait entendre ce chant de joie :

"Volonté et Sagesse, esprit dompté par la discipline, Noble conduite fondée sur la Moralité, Purifient les mortels, ce que ne peuvent faire le rang ou la richesse".
Comme le dit T.H. Huxley: "Le Bouddhisme est un système qui n'a pas de Dieu dans le sens où les Occidentaux le conçoivent, qui nie l'existence d'une âme chez l'homme, qui considère que la croyance en l'immortalité est une erreur, qui refuse de croire à l'efficacité des prières et des sacrifices qui recommande aux hommes de ne compter que sur leurs propres efforts pour parvenir à la libération, qui dans sa pureté originelle, ne comportait pas de vœux d'obéissance et ne recherchait pas l'aide du bras séculier, mais qui cependant, demeure encore la croyance dominante d'une large fraction de l'humanité".